Les Démons

Les adaptations des romans de Dostoïevski pour le théâtre

Une œuvre romanesque porteuse de théâtralité

Les romans de Fiodor Dostoïevski n’ont cessé d’être adaptés pour le théâtre en Russie, en France, comme dans la plupart des pays européens. Dans ces entreprises, deux courants se distinguent que reflètent les spectacles donnés à la Comédie-Française.

Les adaptations « feuilletons »

Le dramaturge d’origine russe Gabriel Arout adapte par deux fois des romans de Dostoïevski pour les mises en scène de Michel Vitold (russe lui aussi) à la Comédie-Française : Crime et Châtiment en 1963, et L’Idiot en 1975. Dans les deux cas, Gabriel Arout signe le spectacle de son nom « d’après Dostoïevski » signifiant la distance qui sépare la version jouée du roman. Pour Crime et Châtiment, la critique souligne la somptuosité du spectacle, mais regrette que l’adaptation s’apparente à une « pièce à péripéties ». En neuf décors, quarante-cinq changements, quatre heures de spectacle malgré les nombreuses coupes imposées par le théâtre à Arout, l’auteur-adaptateur ne supprime aucun personnage et suit scrupuleusement l’ordonnance du roman.

Les adaptations écrites pour des mises en scène spécifiques

Certaines adaptations, telles que celles de Gabriel Arout, préexistent aux projets de mises en scène et subissent des modifications, parfois difficiles, lorsqu’elles sont mises à l’épreuve du plateau.
Ce n’est pas le cas de celle de L’Éternel Mari, dans l’adaptation de Victor Haïm, mise en scène par Simon Eine, à l’Odéon en 1987. La collaboration très étroite entre le metteur en scène et l’adaptateur, lui aussi dramaturge, ne cherche pas à d’être absolument fidèle au déroulé de l’œuvre de Dostoïevski dans une retranscription exacte des péripéties mais permet avant tout de servir le point de vue du metteur en scène.
C’est dans cette veine également que s’inscrit le spectacle de Guy Cassiers d’après Les Démons où la vision dramaturgique du metteur en scène s’impose. L’adaptateur Erwin Mortier explique ainsi:
« Je me suis inspiré de traductions en néerlandais parues depuis les années cinquante, notamment celle de Hans Leerinck (1959) et de Hans Boland (2008), ainsi que de la pièce de Camus. Tout cela a servi de point de départ du texte présent, qui est surtout le résultat d'un dialogue constant avec Guy Cassiers et son équipe. Il s'agit d'un processus organique, davantage qu'un texte définitif que j'aurais produit. Tôt, nous avons décidé, quels personnages, quelles lignes narratives seraient conservées, et ce qui ne le serait pas, et tout cela a évolué au cours du processus d'écriture, car Guy a toujours un œil sur sa scénographie. La langue que j'utilise, est davantage dans l'esprit de cette pièce que dans celui du roman ou de ses traductions. »

Force politique de l’œuvre de Dostoïevski :une œuvre dangereuse ?

La force politique des Démons est soulignée dès la première tentative d’adaptation scénique en Russie, en 1913. Gorki s’oppose alors, idéologiquement, à la mise en scène au Théâtre d’Art de Moscou par V. Némirovitch-Dantchenko, qui avait déjà monté Les Frères Karamazov. Gorki considérait ainsi que l’œuvre de Dostoïevski incarnait les forces conservatrices ayant fait échouer la Révolution de 1905, anéantissant l’espoir de faire sortir la Russie de l’archaïsme pour une modernité occidentale.

Guy Cassiers relève, lui, les résonnances fortes des Démons avec notre actualité, dans la confrontation entre le monde des pères et celui des fils, celui des révolutionnaires de salon que son devenus les premiers, et celui des jeunes nihilistes prêts à user de violence et à provoquer la terreur des seconds. « Mais ces jeunes nihilistes sont à leur tour manipulés par des leaders fanatiques et insaisissables, qui parviennent à capter le mécontentement, le ressentiment et la colère des jeunes et à les transformer en pratique politique radicale. Dostoïevski donne une description très fine de cette dynamique ; de ce fait, son roman continue à tendre un miroir à notre époque. »

Agathe Sanjuan, conservatrice-archiviste de la Comédie-Française, juin 2021

  • Visuel : Crime et châtiment, mise en scène de Michel Vitold, 1963, avec Robert Hirsch, René Camoin, Simon Eine, Catherine Samie, Paul-Emile Deiber - photo. Jacques Pourchot
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