Les Oubliés. Alger-Paris

Le traitement de l’actualité au théâtre

LE THÉÂTRE RACONTE le monde en se réappropriant parfois les moments charnières de son histoire, dont il décrit plus fréquemment les faits sociaux et culturels que les événements politiques. Quotidienne comme la mainmise de la religion sur les personnages moliéresques ou savoureuse comme les récentes reconstitutions de rencontres artistiques et musicales (Trois hommes dans un salon, Comme une pierre qui…), la référence culturelle est inépuisable et consommable sans date de péremption. Dans la lignée des Perses d’Eschyle (472 av. J.-C.) et de Bajazet de Jean Racine (1672) faisant référence à des événements contemporains, l’actualité inspire parfois à chaud des pièces de circonstance comme Cartouche ou les Voleurs (Legrand, 1721) dont l’écriture et la représentation sont concomitantes au procès du célèbre brigand ou comme L’Anglais à Bordeaux commandée à Favart, suite au Traité de Paris de 1763, qui met fin à la guerre de Sept Ans, pour célébrer la réconciliation franco-anglaise. On trouve aussi dans la pièce Tippo-Saëb de Victor-Joseph Étienne de Jouy (1813), la référence à ce prince indien allié de Louis XVI contre les Anglais. La description se fait toutefois le plus souvent en différé dans le théâtre historique, la censure ou des contingences pouvant empêcher une contemporanéité immédiate des faits. Pendant la Révolution, la dizaine de pièces d’actualité politique connaît un succès moindre que les tragédies antiques et les pièces historiques. Et après la réunion de la Troupe dans la Salle Richelieu (1799), il était délicat, avant les années 1830, d’y adapter les sujets évoquant l’actualité immédiate... L’assassinat de Marat par Charlotte Corday est porté à la scène dans la version de Régnier-Destourbet, en 1831, et dans celle de Ponsard en 1850.

En Algérie, je suis une étrangère et je rêve de la France ; en France, je suis encore plus étrangère et je rêve d'Alger

(Mathilde) « Retour au désert »

Au XXe siècle, si les auteurs écrivent davantage sur l’actualité politique, le délai de la mise en scène de leurs pièces à la Comédie-Française altère parfois quelque peu leur contemporanéité. Ce laps de temps semble se réduire à moins d’un demi-siècle lorsque s’importent sur scène des conflits d’autres continents : la guerre de Corée en 1950 (Les Coréens de Michel Vinaver, 1993), les relations entre l’Afghanistan et l’Occident décrites peu avant le 11 septembre 2001 (Homebody / Kabul de Tony Kushner, 2003), le destin des enfants-soldats en République démocratique du Congo (Le Bruit des os qui craquent de Suzanne Lebeau, 2010). La proximité et les stigmates de guerres plus anciennes décrites par des contemporains de la première guerre mondiale comme Karl Kraus (Les Derniers jours de l’humanité, 2016) ou du nazisme comme Bertolt Brecht (La Résistible Ascension d’Arturo Ui, 2017) s’adressent à des spectateurs de moins en moins nombreux à avoir connu les faits relatés. Quant aux cicatrices encore sensibles de la guerre d’Algérie, elles n’ont été portées sur la scène du Français que depuis 2003, avec l’adaptation du roman Nedjma de Kateb Yacine et Le Retour au désert de Bernard-Marie Koltès (2007).

Au Théâtre du Vieux-Colombier, le cycle des « Journées particulières » permet, depuis 2015, de faire réentendre des pièces oubliées du Répertoire en les situant dans leur contexte historique, politique et social. Les faits réels rapportés, tirés de chroniques du temps et de documents d’archives, s’entremêlent à la fiction théâtrale pour l’éclairer et l’expliquer à un public contemporain.

  • Visuel : Homebody / Kabul de Tony Kushner, mise en scène de Jorge Lavelli, 2003, Théâtre du Vieux-Colombier – photo. Laurencine Lot
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